Discours de Claudie Haigneré,
ministre chargée de la Recherche
et des Nouvelles Technologies
Institut de France, le lundi 20 octobre 2003

Allocution prononcée de la remise du Grand Prix Scientifique de la Fondation Louis D.

Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire perpétuel,
Mesdames et Messieurs,
Cher Denis Le Bihan,
Cher Stanislas Dehaene,


La remise d'un prix scientifique aussi prestigieux et aussi richement doté que le grand prix de la Fondation Louis D. est naturellement, pour la ministre chargée de la recherche, un grand moment de satisfaction.

C'est l'occasion d'honorer, dans ce cadre particulièrement solennel, deux éminents scientifiques de notre pays et de donner ainsi à leurs succès un rayonnement qui va bien au-delà de la communauté scientifique.
Mais remettre une distinction c'est aussi marquer la reconnaissance d'une communauté vis-à-vis de personnes éminentes, donner une valeur exemplaire à leur action et communiquer aux autres la passion qui les a animés dans leurs recherches et leurs travaux. Cette remise du prix de la Fondation Louis D. est donc le moyen de faire savoir, en particulier auprès des jeunes, de leurs parents et de leurs proches, que la science est source de grandes satisfactions, tant professionnelles que personnelles, qu'elle est, en bref, l'un des plus beaux métiers du monde.

Le prix remis aujourd'hui me remplit de satisfaction, en particulier, pour trois raisons :

La première raison est le choix que vous avez fait des deux lauréats, Denis Le Bihan et Stanislas Dehaene, en l'honneur desquels nous sommes réunis. Au-delà de l'excellence de leurs travaux scientifiques, cette récompense s'adresse aussi à leur personnalité et à leurs qualités humaines.

Cher Denis Le Bihan, Cher Stanislas Dehaene, vous êtes récompensés cette année pour vos travaux sur l'imagerie du cerveau et ses applications, et notamment pour vos résultats communs obtenus en imagerie par résonance magnétique.

Lorsque j'ai reçu et accepté l'invitation de M. Pierre Messmer à cette cérémonie, je ne pouvais encore savoir que le Prix Nobel de médecine et physiologie allait être attribué, le 6 octobre, aux deux pères de l'IRM, Paul Lauterbur et Peter Mansfield.

Quelle remarquable coïncidence de l'actualité scientifique et quelle meilleure reconnaissance de la place essentielle de l'imagerie dans la recherche sur le plus mystérieux des organes : le cerveau !

La résonance magnétique a donné lieu à de formidables résultats depuis les origines des connaissances sur les phénomènes physiques comme le magnétisme nucléaire ou la supraconductivité jusqu'à leurs applications en instrumentation, en chimie et en biologie structurale.

Cher Denis Le Bihan, Cher Stanislas Dehaene, j'ai le sentiment que votre carrière dans ce domaine de l'imagerie du cerveau, qui est le vôtre, vous réserve encore bien des succès. Le prix prestigieux qui vous est décerné aujourd'hui vous donnera le temps et les moyens de poursuivre la formidable aventure scientifique que vous avez engagée : comprendre les bases cérébrales des fonctions cognitives.

Je me hasarderais également volontiers ce matin à pronostiquer que l'IRM anatomique et fonctionnelle en neurosciences pourrait contribuer, dans les prochaines années, à de nouvelles distinctions par l'Académie de Suède. Avis aux amateurs !

La seconde raison est le fait que vos deux noms soient associés au grand prix scientifique 2003 de la Fondation Louis D. reflète ainsi de manière exemplaire l'exigence de pluridisciplinarité des neurosciences modernes.

Mais curieusement, la complémentarité de vos deux parcours relève du paradoxe. C'est le mathématicien qui est devenu l'expert en sciences cognitives et c'est le médecin qui a contribué à des avancées méthodologiques majeures de l'IRM ! Cette complémentarité des compétences est au cœur du succès que nous saluons aujourd'hui et elle caractérise les centres de recherche les plus prometteurs, tel le Service hospitalier Frédéric Joliot à Orsay, où vous exercez tous deux votre activité.

Au-delà des hommes, je veux donc aujourd'hui saluer le succès d'une œuvre conduite en équipe.

La troisième raison est que ce prix est pour moi le moyen de souligner à nouveau toute l'importance des fondations dans le soutien à la recherche scientifique.

Je voudrais avant tout remercier la Fondation Louis D. d'avoir affiché de façon si remarquable sa volonté de soutien à la recherche.
Je souhaite aussi, à cette occasion, réaffirmer ma conviction que notre recherche peut tirer un bénéfice encore plus grand d'une meilleure utilisation des fondations privées.

Dès 2003 des efforts ont été faits, notamment par mon ministère et le ministère chargé de la culture, pour rendre plus souple le statut des fondations et pour mieux inciter fiscalement les donateurs, qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises.

L'année 2004 verra, j'en suis sûre, les premiers effets positifs de cette politique, qui sera renforcée par la mise en place d'une cellule d'appui au niveau du ministère et par des mesures budgétaires d'accompagnement issues du Fonds des priorités de recherche.

Cher Denis Le Bihan, Cher Stanislas Dehaene, je voudrais, en vous adressant une nouvelle fois mes plus chaleureuses félicitations pour cette récompense, saluer aussi tous vos collaborateurs qui ont rendu possibles les remarquables résultats présentés ce matin. Bravo à vous tous et poursuivez avec enthousiasme cette entreprise fascinante, déjà riche de vos succès, et qui honore notre pays.

Je vous remercie pour votre attention.